Green, Eugène Gallimard, 207 pgs.
Né en 1930, Amédée Lucien Astrafolli va devenir, très jeune, une figure originale des lettres françaises. Il s’illustre dans la défense de l’atticisme (idéal littéraire et linguistique qui se réfère à l’élégance, au goût de la juste mesure et à la sobriété des grands écrivains attiques), face aux assauts des « asianistes », ces barbares prêts à brader les attraits raffinés de la rhétorique classique contre une illusion de modernité. Face à lui, Astrafolli va trouver une jeune sémiologue féministe et révolutionnaire, Marie-Albane de Courtembat, pasionaria des barricades soixante-huitardes, avec qui il va croiser le fer. Un troisième personnage, Julien Tertre, plus jeune que les deux précédents, va s’interposer entre ces deux passionnés : il représente une génération éprise de concret, désireuse de rendre compte de choses plus essentielles à partir de la réalité, tâche pour laquelle les outils du cinéma lui paraissent mieux adaptés que ceux de la littérature… Eugène Green brosse le tableau d’un demi-siècle de luttes idéologiques, de parti pris parfois fumeux, de querelles intellectuelles ou mondaines, dont la jeunesse actuelle tend à se défaire. On retrouve ici les préoccupations d’un écrivain toujours à contre-courant : amour presque mystique de la langue française (venant d’un natif de Barbarie, cela ne manque pas d’être touchant), recherche de l’épure et de la dimension spirituelle dans l’art… Un roman satirique, brillant, inclassable.