Présentation de l'éditeur
Deux narrateurs se succèdent pour raconter — chacun à sa façon — la même histoire, la leur, celle d'une amitié d'enfance, approfondie durant l'adolescence et qui, au bout du compte, paraît se dissoudre peu à peu dans la rivalité conjugale et déboucher sur une surprenante trahison. Du moins est-ce la certitude vécue douloureusement par le premier narrateur.Avec le récit du second, et jusqu'au coup de théâtre final, on comprendra que cette "trahison" n'en était peut-être pas une. Les ressorts de l'amitié — ici admirablement analysés — sont au moins aussi complexes que ceux de l'amour. Une dureté affiché peut dissimuler une forme presque délirante de délicatesse amicale.
Le Dernier ami est peut-être le plus étrange des romans de Tahar Ben Jelloun. Sa brièveté, volontaire, induit une écriture épurée, précise et limpide à la fois. Plus étrange encore : ce texte commence dans le ton de ce qu'on pourrait appeler une littérature d'avoeu, mais qui se trouvera ici subverti. En effet c'est d'un double aveu qu'il s'agit, d'un aveu "croisé" pourrait-on dire de sorte que chacun de ces aveux jette un trouble sur la véracité de l'autre. Roman cruel et dérangeant sur l'amitié, c'est aussi un livre sur la sincérité, sur l'impossible et périlleuse sincérité.
Enraciné dans la réalité marocaine des cinquante dernières années, très concret dans ses péripéties, ce roman atteint cependant à l'universel.
À travers le témoignage contradictoire de deux hommes qui furent longtemps amis, un court roman sur l'amitié et la trahison. L'histoire commence dans le Maroc des années 50 et 60, décennies marquées par la répression policière et la tentation des jeunes pour l'utopie révolutionnaire. Il s'achève dans la mélancolie tangéroise de la fin du siècle, dans une société marocaine à la fois moderne et toujours archaïque.
Avec une incroyable constance, suivi de livre en livre par un public considérable, Tahar Ben Jelloun approfondit ici les thèmes qui hantent tous ses livres : amitié, amour, plaisir, oppression, difficulté des rapports entre hommes et femmes, etc. Il les approfondit en ce sens qu'il s'approche sans cesse davantage du feu. On verra que ce roman-là brûle pour de bon…